16 août 2011

 

Les Meusiens en Crimée (5)

Finalement les gens les plus dynamiques que j'aurai rencontré dans ma vie sont ceux qui font dans l'humanitaire, les ONG, le social, ceux-là te retournent tout et font des exploits tous les jours surtout dans les conditions extrêmes qu'on peut rencontrer dans certains pays. Ca n'est certainement pas les petits branleurs encravatés de frais qui te fourguent des bagnoles avec des options qui sont foutues au bout de deux ans.

Dimanche (dobry den = bonjour) :
Après avoir lu le passage de Fernand Braudel qui explique comment on traitait les pauvres au XVIIè siècle et en avoir conclu que nos dirigeants actuels n'ont rien inventé, je suis la caravane jusqu'à la playa. On s'étale, on s'allonge, on se tartine de crème. Que va-t-il se passer ce matin ? Le stand de tir est calme, pas de client. Je vois arriver un type qui installe un petit palmier en plastique d'un mètre de haut, dispose à côté de ça un gros tigre en peluche de même taille, les proportions ne sont pas respectées. Il veut se baigner avec ou quoi ? Il dresse également un perchoir sur lequel se trouve un faucon plus vrai que nature et qui a vraiment l'air de s'emmerder.
Il le dresse pour la pêche ? Je m'attends à tout maintenant. Je vais prendre une photo de ce décor improvisé. Déjà le gars se met à manifester une certaine mauvaise humeur à mon égard. Je m'éloigne le temps de comprendre le motif de sa réaction. Je le vois qui pose un kefieh sur la tête du gamin, lui met le faucon sur la main puis sort un superbe appareil photo tout en continuant à rouspéter, puis à faire mine de me prendre en photo. Franchement je le trouve idiot de s'énerver à ce point là !
L'après-midi vers seize heures, nous partons à plusieurs vers la fameuse pointe qu'on voit sur les cartes du secteur. Celle-ci forme un grand cap en arc de cercle qui délimite sur un côté la portion de mer où nous nous baignons et qui peut-être la rend si chaude. Pour y aller nous empruntons une route qui très vite se transforme en piste dans un paysage de western. La flore au bord de la route est différente de celle qui se trouve en Lorraine. Les voitures qui passent soulèvent un nuage de poussière que le vent clément éloigne de nous. A mi-chemin se trouve une guérite en dur pour abriter la personne qui actionne une barrière qui ferme le passage. Comme le brave monsieur ne nous demande rien nous passons outre et poursuivons notre marche. En fait il prélève un péage sur les voitures qui passent pour le parking, peut-être, nous ne savons pas encore.
Nous arrivons à l'extrémité de ce cap et nous sommes entourés de véhicules, de tentes qui sont posées là de façon anarchique, le camping dit "sauvage" chez nous est complètement dans les habitudes locales. Les marchands d'emplacements délimités n'ont pas encore mis leurs griffes sur le littoral. Il y a des installations sanitaires, repérables à l'odeur et qui justifient finalement le péage prélevé par les messieurs de la barrière. Nous faisons une pause à la buvette munie de frigos pour lesquels les nombreux poteaux électriques qui ont rythmé le bord de la route fournissent la précieuse électricité dans cet endroit reculé. La vendeuse est une belle petite blondinette typiquement Ukrainienne qui se met à se trémousser quand je lui parle. Voir des étrangers occidentaux, ça lui fait ça, quoi ! C'était vraiment très drôle de la voir minauder à ce point.
Elle me parle avec des petits rires suraigus. Je me ravitaille en Pepsi, c'est devenu ma boisson de randonnée je trouve que ça désaltère mieux que l'eau.
Sur la plage nous retrouvons les amis de Sergueï. Ils sont fort étonnés de nous voir arrivés à cet endroit à pied. On nous avait dit que les Ukrainiens marchaient beaucoup, nous leur en avons mis plein la vue.
Nous repartons vers le village en marchant d'un pas décidé, souhaitant arriver avant la nuit. Nous nous remémorons les chants de marche, les chants scouts, ceux de la Wehrmacht, ceux des colonies de vacances, nous soulevons la poussière serrés les uns contre les autres. Et ça y va !
"A la troupe y a pas de jambe de bois !"
Nous parvenons à la barrière de péage et là les gars manifestent une certaine admiration pour nous. Ils sortent des chaises de leur guérite pour faire asseoir les dames. Ils nous prêtent leurs jumelles pour nous permettre de voir où en sont nos retardataires. Nous faisons quelques photos, nous amusons à fermer la barrière pour barrer les autos. Nous finissons par échanger nos adresses Skype. C'était vraiment sympa ce petit intermède !
Après une randonnée pareille nous préférons casser une petite croûte au motel.

Lundi :
L'excursion du jour ne nous mène pas trop loin : Epatoria.
Le premier objectif est la mosquée. Avant d'y entrer les dames doivent "se déguiser" comme dit Youri qui ne se doute pas qu'il fait ainsi de l'humour involontaire. Elles enfilent la tenue de la bonne musulmane. On s'estime déjà heureux de pouvoir visiter ce lieu de culte alors on va pas chercher la bagarre. Il faut y entrer avec le pied droit en avant comme le Prophète et ne pas franchir la ligne réservée aux croyants. Ah là nous n'avons pas oublié de prendre des photos de nos compagnes, nous ne sommes pas prêts de les revoir comme ça ! Le guide est un petit jeune qui nous fait le cathéchisme traduit par Youri.
Ensuite nous visitons la grande église orthodoxe avec sa décoration Windows (plein d'icônes).
Enfin nous avons quartier libre sur le port et dans les ruelles. Les marchands de cochonneries made in China se pressent sur la digue mais nous ne trouvons pas la moindre carte postale. Ce n'est visiblement pas dans les habitudes des ex-soviétiques d'en envoyer à la famille et aux amis.
Des coquillages typiques du Pacifique mais sûrement pas de la Mer Noire.
Dans les ruelles à quelques pas des lieux de culte du centre ville nous avons l'impression d'être dans les rues de Ramallah en pire. Les chaussées n'ont pas de revêtement et les trottoirs sont occupés le plus souvent par de hautes herbes voire des buissons. Nous évitons de nous y aventurer trop loin, pour ne pas prendre le risque de se perdre ou de se faire agresser. Des rues ont été rénovées mais on n'a pas trouvé de solution pour dissimuler les tuyaux qui distribuent le gaz dans les maisons et qui sont typiques de la Crimée. C'est intéressant de voir sur ces routes non asphaltées des voitures de luxe immatriculées en Russie. Cela montre l'aboutissement du système capitaliste : richesse privée pour très peu de monde et misère publique pour les autres. Notre destin à nous occidentaux.
Repas dans un restau très correct avec une clim' poussée très fort pour nous rappeler les étés lorrains. Une bonne assiette de crudités puis une escaloppe enrobée d'omelette, je pense que certains ont vu que nous avions apprécié ce plat.
Le soir rendez-vous à Razdolnoë pour le spectacle de danses qui doit clôturer le stage de nos élèves, lequel justifiait notre déplacement dans cette contrée.
Nos petits rats sont au maquillage et trompent l'attente en s'essayant à quelques pointes mais ce n'est pas très pratique en tongs.
Nous arrivons dans la salle de spectacle. Tiens je reconnais aussitôt quelqu'un : le gars qui faisait des photos sur la plage la veille. Il me semble qu'il m'a reconnu aussi. Il est le photographe de la soirée. Il me vise bien quand il prend le public en photo. Je le trouve très gamin, finalement.
Le spectacle a été fabuleux et plus d'une fois j'ai pensé à mes parents qui auraient certainement apprécié les costumes très colorés, la fraîcheur de l'exécution des danses, le talent des danseuses confirmées (elles font des écoles pour ça à Paris, ça rigole pas !). Le public a été très bon, applaudissant avec enthousiasme toutes les prestations. Nous avions des places réservées loin de la scène, ce n'était pas pratique pour les photos.
A la sortie nous rencontrons la famille de Nastia dont sa tante et son oncle qui parlent Allemand et qui ont déjà vécu un peu en Belgique.

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